01 octobre 2012

«Les visites des artistes nous donnent à tous des forces»

 «Les visites des artistes nous donnent à tous des forces»

 

En visitant régulièrement les enfants et les jeunes polyhandicapés dans le cadre du programme «Monsieur et Madame Rêve», les clowns de Théodora apportent une bulle d’évasion à tous les intervenants. Visite dans le Centre de rééducation d’Affoltern am Albis avec les artistes Ah, Floh et Madame Bonjour.

 

«Wimbawe, wimbawe, wimbawe» chantonne Ah d’une voix douce et un visage plein d’expressions. Elle a tôt fait d’entraîner la petite Eliane*. La petite fille, timide jusqu’à présent, cherche à pincer elle-même les cordes de l’ukulélé. Son visage rayonne lorsqu’elle parvient à en tirer des sons. «C’était magnifique!» la complimente Ah qui, de joie, fait voler son chapeau tournesol.

Lukas, 10 ans, doit se rendre à la prochaine thérapie: c’est déjà sa troisième aujourd’hui. Mais avant cela, il souhaite encore voir un tour de magie du duo Floh et Ah. Il observe avec une grande attention, désireux de découvrir comment fonctionne le tour. Les clowns lui en ont déjà enseigné plusieurs. Floh se tourne ensuite vers une fillette, sécurisée dans un lit spécial. Elle semble mentalement absente. Floh l’observe, elle se tient simplement près d’elle. Puis elle commence à fredonner doucement. D’abord une vocalise, puis deux, jusqu’à former peu à peu un rythme. Soudain, le visage de la fillette devient attentif. Floh explique: «Ce travail exige de nous une sensibilité particulièrement aiguisée. Nous sommes attentifs aux moindres changements. C’est ainsi que se crée l’interaction.»

Parfois, les artistes sont eux-mêmes surpris. Ah nous parle d’une petite fille qui, à la suite d’un accident de voiture, a dû rester longtemps au Centre de rééducation. Pendant les mois où elle était dans le coma, sans réagir à son environnement, les artistes de Théodora attachaient à son lit un ballon en forme de fleur à chacune de leurs visites. «Au réveil de la fillette, nous avons fêté ça  avec les autres enfants. Elle était pleine de joie en nous voyant gonfler les ballons en forme de fleur» nous confie l’artiste avec émotion. A-t-elle perçu les jeux malgré son coma?

Sensible et constante

Floh se tourne à présent vers une fillette qui l’observe, assise un peu à l’écart dans son fauteuil roulant. «Aimes-tu les chansons?» La fillette secoue la tête. «Les enfants ne souhaitent pas toujours avoir les clowns auprès d’eux. Ils n’y sont du reste pas obligés» nous dit Corinne, une infirmière. Ah n’insiste pas. Elle montre à la petite Eliane, qui a entre-temps échangé l’ukulélé avec une flûte en métal, une façon ludique de dire «oui» et «non».

Au centre des préoccupations  des artistes de Théodora: la rencontre individuelle avec chaque enfant. C’est encore plus vrai pour le travail effectué dans le programme «Monsieur et Madame Rêve» mis en place dans les instituts spécialisés. Au Centre de rééducation d’Affoltern, un entretien préalable et approfondi a lieu avec l’équipe soignante avant de commencer la visite. «Les informations rassemblées par le personnel sur l’état physique et psychique des enfants nous aident énormément à effectuer un travail constructif. Contrairement au travail effectué dans les hôpitaux, nous travaillons ici sur une longue période avec les enfants. Cela nous permet de les connaître et de remarquer très rapidement ce qui leur fait du bien sur le moment» explique Floh. Nicole, infirmière, le confirme: «C’est très appréciable de recevoir toujours les mêmes artistes chez nous. Les enfants ont besoin de cette sécurité.»

«Les artistes de Théodora nous appartiennent»

L’étroite collaboration entre le personnel et les artistes est très importante pour Luk de Crom, directeur du service d’assistance du centre. «Pour nous, les artistes font partie de l’équipe. Leur contribution est également précieuse pour les collaborateurs. L’activité des clowns implique la spontanéité du personnel. Cette fraîcheur est pour nous-mêmes une aide très importante dans le travail d’encadrement. Les visites des clowns mettent en marche beaucoup de choses.» Il avoue être impressionné par la manière ciblée dont ces artistes travaillent. «Elles apportent à tous une énergie positive: aux patients, à leurs proches et aux soignants. Nous sommes très reconnaissants de pouvoir bénéficier gratuitement de ce service. Cela nous soulage et nous donne une nouvelle force. Les clowns nous apportent un complément idéal dans notre tâche, qui consiste à améliorer la qualité de vie des enfants.»

Simon, un jeune homme intervenant dans le cadre de son service civil, décrit l’effet de l’action de ces spécialistes de l’humour: «La visite des artistes fait du mercredi après-midi un véritable événement. Les enfants aux fortes capacités cognitives, qui peuvent s’exprimer correctement, expriment clairement leur enthousiasme. L’effet des artistes est visible même chez ceux qui souffrent de forts handicaps. Ils semblent plus présents et sont plus détendus.»

À la fin de la visite, le petit Noël, six ans, est plein d’énergie. Dans les bras de sa maman, ce petit enfant qui ne peut pas marcher essaie joyeusement de saisir les bulles de savon. Il met ensuite malicieusement le ballon en forme de fleur sous le nez de Ah pour qu’elle en respire le parfum. Noël rit à gorge déployée. OB

*Noms des enfants modifiés.

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